Aujourd’hui je m’aventure dans l’écriture de la fable. Les fabulistes sont de grands maîtres pour enseigner des leçons de vie et démystifier les croyances populaires. Ma fable raconte les habitants de La Minerve. Des personnes inspirantes.

Par Claire Durocher

La route s’allonge à travers la forêt parsemée de lacs. Les kilomètres s’accumulent, mon anxiété se manifeste. J’ai tellement hâte d’arriver à destination. Voilà j’y suis. La Minerve m’accueille telle une légende contemporaine. Je m’assois sur un banc de parc pour entendre la respiration du village. Peu à peu, je l’écoute me raconter sa fable.

une femme assise sur un banc dans un parc

Il y a de cela très très longtemps, un homme s’aventure au nord des Pays-d’en-haut. Cet aventurier du temps, Antoine Labelle, érige des croix à même mes paysages. Sans crier gare, des colons se mettent à faire des choses étranges autour de ces croix. Ils défrichent et font même peur à des milliers de sauterelles venues grignoter le bon blé mûr semé de leurs mains. Je me dis qu’ils sont téméraires ces pionniers de vouloir vaincre les éléments du Nord.

Je ne peux m’empêcher de les observer à travers les aubes et les crépuscules. Il leur fallait un brin de bravoure pour venir s’établir ici. Aucun poltron n’aurait voulu mettre le pied dans ma forêt jusqu’alors impénétrable et d’où jaillissent des cris d’animaux nocturnes.

Les nouveaux arrivants abattent leur dure besogne le jour et se rassemblent pour festoyer sous le ciel étoilé. Ils ont d’étranges animaux avec eux. Des chevaux, je crois. Drôle de coutume, les colons les astiquent à l’huile à lampe et les font parader aux petits trots pour accueillir des visiteurs.

croix de chemin

Un matin, c’est Isaac Grégoire qui se déboise un lopin de terre. Mais gare à lui, je suis fait de roche dure vieille de millions d’années, fière composante du Bouclier canadien. Il persiste avec son épouse et ses enfants. Ils se fondent dans les saisons le plus naturellement du monde, des semences aux récoltes jusqu’aux conserves pour l’hiver.

Bientôt, d’autres arrivent, tous de valeureux gaillards au coeur rempli de bonne volonté. Alfred Mailloux s’amène avec ses talents de forgeron. Le feu rougit les murs de la petite fabrique durant 40 ans.

J’ai même vu des braves acheminer les billes de bois vers les moulins à scie sur les eaux des lacs et de la petite rivière. Décidément, ils m’épatent ces draveurs, marcher sur des billots flottant sur l’eau!

ruisseau dans un sous-bois

Je deviens comme une ruche d’abeilles. La grand-mère baratte la crème pour faire du beurre. Une autre développe une recette de savon et certaines récoltent le lin pour en faire des vêtements.

Par ces temps anciens, il y a même Laurence Paiement, la tireuse de thé du village. Quand elle regarde au fond de sa tasse de thé, on sait que son don de clairvoyance va nous surprendre.

banc de parc décoré de mini corde à linge et autres

Sans parler d’Émile John Vetter venu directement d’Allemagne pour s’installer sur la rive ouest du lac Équerre en 1914. Il réussit à y installer sa famille malgré les allégations d’espionnage contre lui durant la guerre. J’ai l’âme à la tendresse (Pauline Julien) lorsque cette section de mon lac est nommée la Petite Allemagne parce que ces personnes m’ont choisi comme lieu de prédilection.

Dès lors, quelle agitation m’anime! L’aqueduc avec Philippe Valiquette et son tuyau de bois, la «boîte à parole» (téléphone) ou encore les barrages électriques pour sortir chandelle et fanal des maisons et y faire entrer une lumière nouvelle.

sentier avec arbres et plantes

Un jour, j’aperçois un banc sous le baldaquin de mes conifères. Il me raconte qu’il se sentait encombrant dans le sous-sol d’une maison. Maintenant, il savoure sa nouvelle demeure sur le cap de roche du Sentier du village. Là où tous le vénèrent avec son grand panache d’orignal. Chaque visiteur y trouvant son rêve. Y a-t-il plus beau métier que de rendre heureux le visiteur?

banc avec panache d'orignal comme appui bras et affiche Sentier village

Aujourd’hui, mes descendants racontent mon histoire. La petite Mylène Bruneau publie son livre, Sur le chemin des fondateurs, l’appel du Nord d’Étienne Bruneau. Étienne est un des premiers à faire un virage vert en quittant Montréal pour s’installer chez moi. «C’était hier … il y a un siècle … à La Minerve». Dans sa préface, Paul Piché écrit: «Je suis né en ville, mais mes pieds se sont accrochés à La Minerve et c’est dans ses forêts et ses campagnes inspirantes que mes racines se sont formées.»

pochette du livre

On a beau dire que l’argent mène le monde et que les villes se développent grâce à un investissement financier colossal. Moi, La Minerve, je suis fait du courage, de l’ingéniosité, de l’entraide et de l’amour de mes habitants. Ceci fait de moi, une place où il fait bon vivre.

un hamac au coucher de soleil

De nouveaux bâtisseurs arrivent, des érablières sentent maintenant ce parfum délectable de sirop d’érable. De fiers villageois jouent au pickleball sous le préau tandis qu’au club Mine de rien, on démystifie l’alphabet au Scrabble. Qui n’a pas envie de rencontrer Les doigts d’Art minervois ou de jouer au Parc des sourires?

De plus, quelle chance inouïe, des défenseurs de mes beautés naturelles surveillent les plantes envahissantes qui s’en prennent à mes lacs.

un lac au pied d'une montagne

Je suis au bout du monde et à la fois si près. Je suis certifiée Ville amie des monarques, Ville Amie des aînés. J’ai une maison des jeunes, un musée et toujours ma fameuse épicerie.

J’ai l’odeur des arbres, l’arôme de la végétation sauvage. Il faut entendre le bavardage du vent et des vagues sur mes lacs. Il faut voir les moutons broutant l’herbe fraîche, tout en rentrant doucement au bercail, à la lueur du coucher de soleil.

moutons dans un pré le soir

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