“L'espoir ... y a-t-il un moment où l'on abandonne ?”

Je suis fière de ma vie. J’ai reçu le cadeau d’être sensible à mon entourage. Je vois la beauté autour de moi et ça rend joyeux. J’ai donné des outils à autrui pour qu’il puisse aller plus loin.

Je pense souvent au philosophe qui dit que la vie est comme un fleuve. Elle suit sa route sinueuse à travers félicités et grisailles. Elle est parfois cascade aux charmes doucereux. D’autres fois, elle est chute qui chambarde tout. Sur ses rives, passent les rochers abrupts comme les plages ensoleillées. Cette métaphore d’un sage est un baume les jours d’orage et une pommade les jours de quiétude.

port sur un fleuve

À 20 ans, je travaille auprès d’enfants sans milieu familial, sans milieu scolaire, sans milieu social, bref seuls au monde. Je me demande ce qui peut bien donner de l’espoir à ces jeunes?

J’arrive directement de ma tour d’ivoire familiale où la violence et la détresse ne m’ont pas atteinte. Je commence ce travail sans aucune information. Noyée dans mon ignorance, je crois en mes semblables tout en ayant aucune idée de la vie dans les rues de la ville.

Premier matin, première surprise. Ma superviseure porte la longue robe grise des religieuses. Elle se déplace en mobylette et son voile vole au vent. Dès lors, je sais que j’ai tout à apprendre.

une religieuse avec un voile

Un lien de confiance se développe avec les enfants. Ils commencent à rêver, à faire confiance et à croire en l’espoir. Chaque jeune devient la personne qu‘il veut être en expérimentant diverses activités.

Un jour, j’amène les filles coucher dans un chalet sans commodité en plein hiver. Toute la nuit, elles font du feu dans le foyer. Au matin, je vois tant d’admiration dans leurs yeux. Elles sont fières, elles se sont trouvées. Le lendemain, une d’entre elles, dont le corps a été souillé, se rend à la salle à manger pour la première fois. Je suis morte de trouille, comment réagiront les garçons? Elle est accueillie comme l’une des leurs. Elles peut dès lors commencer à accepter la personne qu’elle est de corps et d’esprit.

Les filles rayonnent d’un premier espoir.

sourire entre un grand-papa et sa petite-fille

Une autre fois, toujours en hiver, je me rends à un chalet sur le bord d’une rivière avec une dizaine de jeunes. Ensemble on fabrique un bateau à voile pour glisser sur la rivière. On place un banc à lenvers, on y attache un grand plastique et le vent nous promène sur la rivière gelée. On rêve, on s’imagine, on rit, on partage. Le soir, on dort près du feu de la cheminée, la journée a atteint son comble.

Il y a tant à faire d’une vie quand on a l’espoir.

une rivière gelée

Certaines fois, les jours sont moroses, même terribles.

Un bel après-midi d’été, j‘amène un enfant au cinéma. Mauvais hasard, nous tombons sur sa mère qui me sermonne parce qu’il n’a pas mis un habit du dimanche et des souliers de soirée pour aller au cinéma. Aller au cinéma en espadrille, il n’en fallait pas plus pour qu’elle demande la garde de son fils qu’elle avait abandonné. Triste et sans défense, le jeune retourne chez sa mère et… deux jours plus tard, il se pend dans sa garde‑robe.

porte en pierre d'un site archéologique

L’espoir peut-il être au rendez-vous?

Il faut savoir écouter le vécu des enfants de la rue. Nos actions sont guidées par nos expériences personnelles. Ce sont elles qui nous font comprendre notre entourage. Parfois, nos expériences sont inutiles face à des réalités inimaginables pour nous. Comment savoir ce que c’est que de manger avec les doigts parce qu’on n’a jamais vu dustensiles, jamais vu de cabines téléphoniques, jamais vu de douches

une femme et un enfant regarde vers le ciel

Aujourd’hui, je sais que l’espoir est une nécessité. Je suis souvent dans une forêt de broussailles. Le brouillard s’invite et tasse la légèreté de la vie.

Je dois renaître. Retrouver qui j’étais avant les coups durs n’a pas d’attrait, ni d’avantage pour moi. Je choisis plutôt de trouver la personne que je veux être pour tracer mon futur.

une femme en haut d'une montagne

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2 Comments

  • Anne-Marie dit :

    Je pense que l’espoir est un privilège. Nous ne sommes pas tous dotés de ce qu’il faut pour connaître l’espoir de jours meilleurs, d’une guérison, d’une capacité de grandir ou de se dépasser. Le désespoir est un fardeau mais sûrement pas un choix. Nous ne naissons pas tous égaux, avec les mêmes pouvoirs, les mêmes vouloirs, les mêmes capacités.

    • Claire Durocher dit :

      Bien dit. On pense que tous les humains sont pareils. Que chacun a la possibilité d’avancer vers son bien-être. Que chacun est responsable de son bonheur. On oublie que les facteurs innés, physiques et sociaux, sont un déterminant important.

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